Territoires connectés et durables : quel avenir d’ici 2035 ? L’analyse des experts.

Vendredi 17 janvier 2025

Découvrez le 2e observatoire des territoires connectés et durables, l’étude d’InfraNum et Tactis sur les territoires connectés et durables : analyse des projets numériques, coûts, impacts économiques et sociaux jusqu’en 2035. Un éclairage incontournable pour les collectivités et la transition énergétique.

 

Entretien croisé : éclairages d’experts sur les territoires connectés et durables

 

La fédération InfraNum, en partenariat avec la FNCCR et la Banque des territoires, a publié en novembre 2024 l’Observatoire des Territoires Connectés et Durables. Une étude nationale réalisée par les cabinets Tactis et Releaf Carbon. Nicolas Potier, directeur associé de Tactis et Bertrand Blaise, président de la commission Territoires Connectés & Durables d’InfraNum partagent à Sogetrel leur éclairage sur les défis et opportunités des territoires connectés et durables.

Quelle est l’ambition de cette étude nationale sur les territoires connectés et durables ?

Nicolas Potier : Elle a pour objectif de mesurer les coûts et les gains socio-économiques des projets de territoires connectés et durables d'ici à 2035. D’un point de vue méthodologique, nos calculs reposent sur une analyse multidimensionnelle détaillée de 5 cas d’usage dans 5 grandes verticales métiers. Nous n’avons donc aucune prétention d’exhaustivité puisque la gestion d’une ville implique en moyenne 170 métiers.

En revanche, cette étude a une portée à la fois macro, concrète et prospective puisque les 5 cas d’usage retenus sont les plus perméables à une logique d’industrialisation de projets de territoires connectés durables :

  • la télérelève des compteurs d'eau ;
  • le pilotage de l'éclairage public ;
  • la gestion des bâtiments ;
  • les points d'apport volontaire (PAV) connectés ;
  • la vidéodétection des incendies.

Cette approche méthodologique confère à ce travail une dimension exploratoire d’autant plus inédite qu’il n’existait à ce jour aucune production scientifique de référence pour évaluer le rapport coûts-bénéfices de la smart city. 

 

Bertrand Blaise : Cette étude, dont une version enrichie est attendue en mars 2025, constitue un outil précieux de compréhension et d’aide à la décision pour tous les acteurs de la filière. Elle permet aux collectivités d’inscrire les projets de territoires connectés et durables dans une réflexion économique globale et de faire des arbitrages éclairés en mettant en rapport les investissements et les gains, qu’ils soient financiers, sociaux et environnementaux. La bonne nouvelle, c’est que la balance coûts-bénéfices est positive ! Autrement dit : il est pertinent d’engager des projets au regard des enjeux de transition énergétique, mais également en termes de rentabilité économique et sociale.

Plus précisément, pouvez-vous décrire les échelles de coûts engagés ? 

N.P : Elles ont été construites sur la base de scénarios d'adoption d’équipements numériques d'ici 2035, en partant d’une hypothèse basse. Sur ces bases, nous avons calculé que l'investissement global nécessaire serait de l'ordre de 2,2 milliards d'euros d'ici 2035, avec plusieurs projections de progressions :

  • de 25 % en 2024 à 52 % en 2035 pour la télérelève des compteurs d'eau ;
  • de 24 % à 60% pour l’éclairage public ;
  • de 12 % à 34% pour le pilotage énergétique des bâtiments ;
  • de 18 % à 26% pour les surveillances des PAV ;
  • de 7 % à 22% pour les incendies.

 

« Pour l’eau par exemple, l’étude des territoires connectés et durables évalue le potentiel d’économie à 396 millions de m³, soit l'équivalent de 165 piscines olympiques par département et par an. »

Nicolas Potier, directeur associé de Tactis

Pour quels bénéfices ?

Nicolas Potier : Le cumul des gains sociaux et environnementaux sur la période 2025-2035 équivaut à 3,4 milliards d’euros. L’étude des territoires connectés et durables évalue le potentiel d’économie à 396 millions de m³ pour l’eau par exemple, soit l'équivalent de 165 piscines olympiques par département et par an, et 1 à 1,5 milliard d'euros d'économies. Côté éclairage, on est sur 4 TWh d'économies sur 10 ans. 

Quelle méthodologie adopter face au ratio coûts-bénéfices économiques, qui varie assez sensiblement d’un cas d’usage à l’autre ?

B.B : La fédération InfraNum défend une approche pas à pas, qui tient compte de la situation, des priorités, des moyens et des contraintes spécifiques de chaque territoire. Les collectivités doivent pouvoir commencer avec un ou deux cas d’usage, avec la perspective de bénéfices rapides, sans pour autant occulter la nécessité d’entretenir une vision territoriale globale.

N.P : Si on raisonne en termes de passage à l’échelle et d’industrialisation, on peut considérer qu’il y a deux cas d’usage phares :

  • la télérelève, qui représente les ¾ de l’investissement global estimé par l’étude, soit 1,6 milliard d'euros.
  • la gestion énergétique des bâtiments qui englobe l'énergie des bâtiments (294 millions), l'éclairage public (152 millions) et, très loin derrière, la détection des incendies et l'équipement des PAV, chacun pesant moins de 2 % de l’enveloppe.

On peut donc poser l’hypothèse qu’une collectivité, si elle a le souci de ne pas disperser inutilement ses dépenses, a intérêt à attaquer le sujet de la numérisation par au moins la télérelève et/ou le bâtiment, idéalement par les deux. En actionnant cette double clé d’entrée, les territoires ont tout à gagner.

« Mutualiser ne signifie pas abandonner les expertises des uns et des autres. Il s’agit de se donner les moyens de travailler ensemble dans une dynamique de multiplication des bénéfices. »

Bertrand Blaise,

Président de la commission Territoires Connectés & Durables d'InfraNum

L’étude montre également que la mutualisation permet aux territoires d’avancer plus vite et sur un périmètre élargi de projets...

B.B : La mutualisation est indispensable et appelle un important effort d’acculturation des responsables politiques et techniques aux différents échelons territoriaux. Mutualiser ne signifie pas abandonner les expertises des uns et des autres. Il ne s’agit en aucun cas d’oublier comment on travaillait « avant ». Il s’agit de se donner les moyens de travailler ensemble dans une dynamique de multiplication des bénéfices, en articulant avec fluidité les différentes briques de services. Une démarche qui doit se faire sur la base de gouvernances adaptées et grâce à des choix technologiques pertinents.

Quid des transformations en termes de gestion des emplois et des compétences induites par la digitalisation des territoires ? 

N.P : En matière d'emploi, on notera que les créations pourraient être légèrement supérieures aux destructions. 4 500 ETP se transforment en 4 700 ETP. Mais pour cibler une compensation quasi parfaite, encore faut-il engager des efforts substantiels de formation et d’accompagnement des personnels.

B.B : Dès aujourd’hui, les collectivités et les industriels doivent anticiper l’évolution des profils dont les territoires auront besoin. Là encore, la mutualisation est essentielle car elle va permettre aux élus et aux directeurs de service d’élargir la focale du diagnostic, de poser de grands chiffres sur les mouvements à anticiper, où il faut et quand il faut. Le tout en tenant compte des ressources et des potentiels en place, de la pyramide des âges, des besoins de recrutement. C’est véritablement une transformation de la filière qui est ici en jeu. 

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