Comment Nevers optimise la gestion de son réseau d'eau grâce à l’IA
Il y a un an, Nevers Agglomération s’est lancé dans une aventure technologique inédite : l'expérimentation de l'intelligence artificielle (IA) pour optimiser la gestion de son réseau d'eau potable.
Traditionnellement, la détection et la réparation des fuites nécessitent une analyse minutieuse et chronophage des données par les opérateurs. Avec l'IA, Nevers Agglomération a pu automatiser et accélérer ce processus. Ce projet s'inscrit dans une tendance plus large d'adoption des technologies intelligentes pour la gestion des infrastructures urbaines, offrant des perspectives intéressantes pour d'autres collectivités. Quels enseignements tirer de ce projet ?
Être plus réactif pour gagner du temps
Comme toutes les collectivités françaises, l’agglomération de Nevers est confrontée à de nombreux défis autour de l’eau : vieillissement des infrastructures, augmentation du besoin en eau, changement climatique ou encore l’évolution réglementaire. C’est pour y répondre que Nevers s’est appuyé sur l'IA, utilisée pour analyser les données collectées par des capteurs installés sur le réseau. Ces capteurs mesurent divers paramètres tels que la pression, le débit et la qualité de l'eau, qui sont transmis et analysés par des plateformes dotées d’algorithmes sophistiqués.
Des besoins clairement définis pour des bénéfices maximisés
Réduire les pertes d'eau : Les fuites d'eau représentent une perte significative de ressources et augmentent les coûts de gestion. L'IA peut aider à détecter ces fuites en temps réel, permettant ainsi une intervention rapide et une réduction des pertes.
Améliorer le service de distribution : Une distribution optimisée de l'eau permet de réduire les coûts énergétiques et de garantir une meilleure efficacité du réseau.
Suivre et analyser la qualité de l’eau : La surveillance continue de la qualité de l'eau permet de détecter rapidement les contaminants et de garantir une eau potable de haute qualité pour les habitants.
Optimiser la maintenance du réseau : Il s’agit là du principal objectif du projet. En effet, la maintenance du réseau d’eau est un processus coûteux et fastidieux particulièrement chronophage dans la mesure où il nécessite des investigations pointues. En anticipant les besoins de maintenance, l'IA permet de prévenir les pannes et de prolonger la durée de vie des infrastructures. Cet objectif d’optimiser la maintenance repose sur 3 besoins :
- Réduire le temps d’analyse des données par les opérateurs humains : Avant l'introduction de l’IA, l'analyse des données pour détecter les fuites était un processus manuel prenant plusieurs heures par jour. Grâce à l'IA, ce temps a été réduit de 95 %, permettant aux opérateurs de consacrer leur temps à d'autres tâches essentielles.
- L’anticipation des dysfonctionnements : L'IA permet de détecter non seulement les fuites existantes mais aussi les signaux faibles indiquant des anomalies potentielles. Cela permet aux équipes d'intervention de planifier des actions préventives avant que les problèmes ne deviennent graves. L'idée est de passer d'une approche réactive à une approche proactive, et ainsi minimiser les interruptions de service et les coûts.
- Optimiser les interventions : En fournissant aux équipes des informations précises et prioritaires, les données analysées par l'IA permettent de localiser précisément les zones à risque et de prioriser les interventions en fonction de la criticité des anomalies détectées. Cette optimisation permet non seulement de réduire les coûts d'intervention mais aussi d'améliorer la qualité du service fourni aux citoyens en minimisant les perturbations et en garantissant un approvisionnement continu en eau.
Un projet structuré en trois étapes
Première phase : Génération de tableaux de bord synthétiques
La première phase du projet consistait à générer des tableaux de bord synthétiques sans utiliser l'intelligence artificielle. Ces tableaux de bord ont permis de centraliser et de visualiser les données collectées par les capteurs installés sur le réseau. Cette étape a permis aux opérateurs de gagner environ 50% de temps en analyse, en offrant une vue d'ensemble claire et synthétique des performances du réseau. Bien que cette phase n'ait pas impliqué l'IA, elle a été essentielle pour établir une base de données robuste et préparer l'intégration des technologies plus avancées.
Seconde phase : Introduction de l'IA pour l'analyse des anomalies
La deuxième phase a introduit l'intelligence artificielle pour analyser les anomalies du réseau d'eau. L'IA a été utilisée pour passer au crible les données collectées et identifier les signaux indiquant des fuites ou d'autres anomalies.
Troisième phase : Développement de la dimension prédictive
La dernière étape du projet est de développer une dimension prédictive à l'outil d'IA. L'objectif est de permettre à l'IA de déceler les signaux faibles qui précèdent l'apparition d'une fuite, parfois plusieurs jours à l'avance. Cette capacité prédictive permettra aux équipes d'exploitation de mettre en place des interventions préventives, permettant d’éviter des conséquences lourdes, tant fonctionnelles que financières, en anticipant les problèmes avant qu'ils ne deviennent critiques.
Quels enseignements tirer de l’expérimentation de Nevers Agglomération ?
Gains de temps et d’efficacité
L'un des enseignements les plus significatifs de ce projet est le gain de temps pour l'analyse des données. Avant l'introduction de l'IA, les opérateurs passaient environ deux heures par jour à analyser les données pour détecter les fuites. Avec l'IA, ce temps a été réduit à quelques minutes seulement, représentant un gain de 96%.
« L’IA nous aide à améliorer le traitement humain de la donnée ce qui augmente notre réactivité face aux fuites. Aujourd’hui, résorber une fuite (détection et intervention) nous prend en général moins de deux heures, contre jusqu’à plusieurs jours auparavant », résume Dominique Derangere, chef de service eau et assainissement au sein de Nevers Agglomération*.
Réduction des pertes en eau potable et économies
L'utilisation de l'IA a également entraîné une réduction significative des pertes en eau potable. Les fuites d'eau, qui représentaient une part importante des pertes, ont été détectées et réparées plus rapidement grâce à l'analyse automatisée des données. La réduction des pertes en eau potable varie entre 25% et 50%.
Le projet a également permis de réaliser des économies énrgétiques et budgétaires importantes. En réduisant les pertes en eau potable, Nevers Agglomération a également diminué la quantité d'énergie nécessaire pour la production et la distribution de l'eau. Les économies en énergie peuvant atteindre jusqu'à 50%, ce qui représente un montant annuel de 100 000 euros. De plus, le temps d'analyse économisé a permis d'obtenir un retour sur investissement de seulement un an.
Anticipation et prévention des casses
Un autre enseignement clé est la capacité de l'IA à anticiper les dysfonctionnements du réseau. En analysant les données et en détectant les signaux faibles, l'IA permet d'identifier les comportements anormaux avant qu'une casse ne survienne. Cela a permis à Nevers de planifier des interventions préventives et de réduire les interruptions de service. Le modèle d'IA apprend en continu grâce aux données contextuelles et à l'expertise des opérateurs, devenant ainsi de plus en plus efficace au fil du temps.
*Source : SmartcityMag
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